Introduites il y a plus de 20 ans dans le Règlement d’exemption (CE) n°2790/1999, les notions de « ventes actives » et « ventes passives » ont été récemment redessinées avec l’adoption du nouveau Règlement d’exemption (UE) n°2022/720 (le Règlement), afin de tenir compte de l’évolution du commerce en ligne. Alors que l’ancien Règlement d’exemption (UE) n°330/2010 renvoyait à ses lignes directrices pour la définition de ces deux notions, la Commission européenne les a définies à l’article 1 du Règlement, notamment en affinant la ligne de partage entre « ventes actives » et « ventes passives » en matière de vente et de publicité en ligne.
Le Règlement définit les « ventes actives » comme le ciblage actif par le vendeur de clients par différents moyens de communication directe (par exemple au moyen de visites, de lettres, de courriers électroniques, d’appels téléphoniques) ou par le biais de publicité et de promotion ciblant un territoire ou une clientèle particulière, que ce soit par l’utilisation d’Internet ou non (par exemple au travers de médias sociaux ou de services publicitaires qui permettent à l’annonceur de cibler les clients en fonction de leurs caractéristiques particulières, y compris leur localisation ou leur profil).
Les « ventes actives » supposent une action volontaire du vendeur pour inciter l’achat du client. A l’inverse, le nouveau Règlement définit les « ventes passives » comme les ventes non recherchées par le vendeur et qui font suite à des demandes spontanées de clients individuels. Tel est notamment le cas de la vente d’un bien à un client situé en dehors du territoire exclusif, qui s’est abonné lui-même à une newsletter et a ensuite passé commande, ou encore de la livraison d’un bien à un client si la vente n’est pas le résultat d’un ciblage actif du client, ou bien de la vente résultant de la participation à des marchés publics ou répondant à des procédures de passation de marchés privés.
La Commission européenne a fait évoluer les contours de ces deux notions pour prendre en compte l’importance du commerce et de la publicité en ligne.
Il est par exemple intéressant de noter que si selon les lignes directrices de 2010, l’utilisation d’un site de vente en ligne était généralement conçue comme une vente passive, quelles que soient les options linguistiques offertes sur le site, le fait de proposer sur un site de vente en ligne des langues qui ne sont pas communément utilisées sur le territoire sur lequel l’acheteur est établi constitue désormais une vente active (à l’exception de l’utilisation de l’anglais considéré comme une langue communément utilisée dans l’Union).
Par ailleurs, en matière de promotion, l’utilisation de techniques d’optimisation afin d’améliorer la visibilité ou le référencement d’un site dans les résultats de moteurs de recherche est, en principe, une forme de vente passive dans la mesure où cette publicité vise à faire connaître le vendeur à des clients potentiels. Toutefois, sera considérée comme une vente active le référencement payant sur un moteur de recherche qui permet de cibler de territoires ou des catégories spécifiques d’acheteurs pour lesquels
la publicité sera affichée.
Dans le même sens, l’exploitation d’un site Internet dont le domaine de premier niveau correspond à un territoire autre que celui sur lequel le distributeur est établi sera considérée comme une vente active, alors que l’exploitation d’un site avec l’utilisation d’un nom de domaine générique sera considérée comme une vente passive.
De manière générale, la prohibition des ventes actives visant à protéger le système de distribution mis en place peut bénéficier de l’exemption prévue par le Règlement, contrairement à la restriction des ventes passives qui est par principe interdite et ne peut être mise en œuvre que dans certaines circonstances en matière de distribution sélective.
Les restrictions aux ventes actives et passives peuvent prendre différentes formes, telle qu’une interdiction directe prévue dans un contrat de distribution, de franchise ou encore de licence. Les restrictions peuvent prendre la forme d’une obligation de transmettre au fournisseur les commandes liées à des ventes hors territoire (Commission européenne, 9 juillet 2019, Sanrio / Hello Kitty). Elles peuvent également résulter de mesures indirectes, comme l’autorisation obligatoire du fournisseur pour réaliser des ventes hors territoire, la menace de non-reconduction de contrats si les interdictions des ventes hors réseau n’a pas été respectées (TUE du 6 juillet 2009, Volkswagen/Commission, T-62/98), ou l’obligation faite à l’acheteur de répercuter sur le fournisseur les bénéfices générés par les ventes hors territoire (Commission européenne, 25 mars 2019, Nike, T.40436).