La phase II, plus qu’une simple extension de la phase I, constitue un examen approfondi qui est appelé à durer. La Partie notifiante doit donc se préparer à des échanges intenses, soutenus par des arguments robustes et s’inscrire dans une stratégie d’argumentation solide : l’ouverture d’une phase II par l’ADLC doit être comprise comme un indice de sa volonté d’instruire de façon exhaustive.
La configuration procédurale de la phase II contribue par ailleurs à modifier la relation avec les services d’instruction. Si ceux-ci restent les interlocuteurs privilégiés de la Partie notifiante jusqu’à la séance et ceux qui introduisent le cas auprès du Collège, c’est ce dernier qui est décisionnaire, dans toute son indépendance – et non plus le seul Président. La phase II introduit donc une collégialité de la décision de contrôle des concentrations. Elle peut, à ce titre, contribuer à ouvrir des opportunités de conviction pour la Partie notifiante, tout au long des échanges et du travail d’analyse avec l’équipe de rapporteurs, qui constitue même un travail « épuisant et exhaustif » (Whish 2015), mais aussi au moment des démonstrations devant le Collège – et d’autant plus en réalité que l’ouverture d’une phase II doit être anticipée dès avant que ne s’engage la phase I, dans les discussions de prénotification.
Les Lignes Directrices (para. 298) proposent plusieurs illustrations de ce que peut être un « doute sérieux d’atteinte à la concurrence » : les cas où « la pratique décisionnelle n’est pas suffisamment établie » ou que « des évolutions importantes et récentes sur les marchés concernés sont susceptibles de justifier une modification significative de la pratique » ; ceux qui présentent des « enjeux particulièrement complexes » qui ne peuvent être suffisamment analysés dans le cadre de la phase I (« par exemple en ce qui concerne la définition des marchés pertinents ») ; ou lorsque la Partie notifiante n’a pas proposé d’engagements suffisants – ni suffisamment pertinents. Autrement dit, c’est une phase incontournable pour que l’ADLC fasse évoluer, par exemple, une définition de marché comme elle l’a fait dans sa décision n°16-DCC-111 du 27 juillet 2016 (Fnac/Darty), par laquelle « pour la première fois, l’Autorité a défini un marché incluant les canaux de distribution en ligne et en magasins » (Communiqué de presse du 18 juillet 2016).