Juridictions spécialisées

 

Définition auteur

 

Premier aperçu

En ce qui concerne la compétence matérielle, l’action en concurrence déloyale doit être portée devant les juridictions de droit commun : tribunal de commerce, tribunal judiciaire ou conseil de prud’hommes. Les litiges entre commerçants relèvent du tribunal de commerce. 

En revanche, conformément aux articles L. 615-19 et L. 716-3 du code de propriété intellectuelle, les actions portant à la fois sur une contrefaçon de brevet ou de marque et des actes de concurrence déloyale relèvent obligatoirement de la compétence du tribunal judiciaire. Il en va de même lorsque les deux parties sont des non-commerçants. C’est le cas des litiges entre professions libérales. Quand un commerçant attaque un non-commerçant, il doit le faire devant le tribunal judiciaire. En revanche, si un non-commerçant désire agir contre un commerçant, il a le choix du type de tribunal. Enfin, il faut saisir les prud’hommes si la concurrence déloyale, pour les aspects ayant trait aux agissements d’un salarié est liée au comportement dudit salarié. Notamment la violation de l’obligation générale de loyauté du salarié envers son employeur. Le plus souvent, le comportement déloyal intervient par la violation d’une clause de non-concurrence.

 

Pour aller plus loin

Concernant la compétence territoriale, le demandeur peut porter l’affaire devant la juridiction du domicile du défendeur, celle du lieu du fait dommageable ou encore celle du lieu où le dommage a été subi. Il existe des compétences territoriales spéciales en matière de brevet.

Concernant les actions indemnitaires du fait de pratiques anticoncurrentielles, elles relèvent de la compétence : 

  • soit des juridictions de l’ordre judiciaire spécialisées en application de l’article L. 420-7 du code de commerce ;
  • soit des juridictions de l’ordre administratif lors que la personne publique est, soit  auteur (Cass. 1re civ., 29 septembre 2004, EDF c/ SNIET, n° 02-18.335 ; CAA Paris, 14 juin 2010, M. Scalet c/ FFF et LFP, n° 08PA00502), soit victime de la pratique anticoncurrentielle (CE, 19 décembre 2007, Société Campenon Bernard, n° 268918 ; T. conf., 16 novembre 2015, Région Île-de-France c/ M. Nautin et autres n° C4035).

En application de l’article L. 420-7 du code de commerce, des juridictions de l’ordre judiciaire sont désignées dans la partie réglementaire de ce même code (art. R. 420-3, R. 420-4 et R. 420-5 C. com. pour la métropole, et R. 914-1, R. 924-1, R. 954-1 C. com. pour les collectivités d’outre-mer) afin de connaître de tout litige relatif à l’application des règles énoncées aux articles L. 420-1 à L. 420-5 C. com. ainsi qu’aux articles 101 et 102 (anciens art. 81 et 82 TCE) TFUE, et ceux dans lesquels ces dispositions sont invoquées. En première instance, ces juridictions spécialisées sont au nombre de huit (Marseille, Bordeaux, Tourcoing, Fort-de-France, Lyon, Nancy, Paris et Rennes).

En appel, la cour d’appel de Paris est exclusivement compétente pour connaître des appels exercés contre les décisions rendues par les juridictions désignées en première instance. Des précisions concernant la désignation des juridictions compétentes à Mayotte et aux îles Wallis et Futuna sont précisées dans l’article 8 de l’ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017 relative aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles.

Dans le cadre d’une action ayant pour objet la réparation des préjudices nés de la commission de pratiques anticoncurrentielles, le demandeur fonde ses prétentions sur le droit de la responsabilité civile en invoquant la commission par le défendeur d’une pratique anticoncurrentielle définie aux articles L. 420-1 à L. 420-5 C. com. et aux articles 101 et 102 TFUE. Dès lors que ces dernières dispositions sont invoquées dans le cadre de la démonstration du fait générateur de responsabilité, l’action indemnitaire relève de la compétence des juridictions civiles et commerciales spécialisées précitées (v. Cass. com., 9 novembre 2010, n° 10-10.937). Il s’agit d’une compétence exclusive sanctionnée par une fin de non-recevoir d’ordre public qui doit être soulevée d’office en application de l’article 125 du code de procédure civile à tout stade de la procédure.

Concernant les litiges fondés sur l’article L. 442-6 du code de commerce relatif aux pratiques restrictives de concurrence, qui englobent notamment les notions de déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties et de rupture brutale de relation commerciale établie, ils relèvent de la compétence exclusive des juridictions spécialisées prévue par les articles D. 442-3 et D. 442-4, ainsi que par les annexes 4-2-1 et 4-2-2 du même code (selon que le litige est porté devant un tribunal de commerce ou un tribunal judiciaire).

En première instance sont désignées les huit juridictions ci-dessus détaillées, en appel de la compétence exclusive de la cour d’appel de Paris. Aux termes d’un arrêt du 29 mars 2017, confirmé par un second arrêt du 26 avril 2017, la Cour de cassation, a cependant jugé que dans certaines situations, ces litiges peuvent échapper à la compétence exclusive de la cour d’appel de Paris et être valablement portés devant une autre cour d’appel. Ces règles de compétence exclusive sont applicables depuis le 1er décembre 2009 et s’appliquent aux procédures judiciaires introduites postérieurement à cette date.

Concernant les référés, le code de procédure civile ne prévoit pas de dispositions particulières en ce qui concerne la compétence territoriale du juge des référés. Les règles de droit commun relatives à la compétence territoriale sont donc applicables. Ainsi le juge des référés compétent sera en principe celui de la juridiction territorialement compétente au fond. Néanmoins la jurisprudence a admis que cette compétence n’excluait pas celle du juge dans le ressort duquel est né l’incident ou celui dans le ressort duquel les mesures d’urgence doivent être prises (Cass. 2e civ., 10 juillet 1991, n° 90-11.815).

Par ailleurs, en application de l’article L. 420-7 C. com., les actes introductifs d’instance devant les juridictions des référés invoquant l’application des articles L. 420-1 à L. 420-5 C. com. et des articles 101 et 102 TFUE paraissent devoir être enrôlés devant les juridictions spécialisées rappelées ci-dessus. Une solution similaire a été retenue en jurisprudence pour l’application des articles L. 442-6 et D. 442-3 C. com. relatifs à la spécialisation des juridictions statuant sur les pratiques restrictives de concurrence (v. CA Paris, 5 juin 2014, RG 13/19047).

 

Jurisprudences pertinentes

T. conf., 16 novembre 2015, Région Île-de-France c/ M. Nautin et autres n° C4035

CA Paris, 5 juin 2014, RG 13/19047

CAA Paris, 14 juin 2010, 5M. SCALET c/ FFF et LFP°, n° 08PA00502

Cass. com., 9 novembre 2010, n° 10-10.937

CE, 19 décembre 2007, Société Campenon Bernard, n° 268918

Cass. 1re civ., 29 septembre 2004, EDF c/ SNIET, n° 02-18.335

Cass. 2e civ., 10 juillet 1991, n° 90-11.815

 

Bibliographie

Ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017 relative aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles, JORF n° 0059 du 10 mars 2017

Auteur

Citation

Béatrice Charlier-Bonatti, Juridictions Spécialisées, Dictionnaire de droit de la concurrence, Concurrences, Art. N° 107230

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Éditeur Concurrences

Date 1er février 2023

Nombre de pages 842

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