La question d’un droit de propriété d’une personne physique sur ses propres données personnelles fait l’objet de nombreux débats depuis des années. L’un des enjeux de ces réflexions tient évidemment à la commercialisation par soi-même de ses propres données personnelles. La question n’a pas encore été tranchée par les juridictions et les autorités (si la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés -CNIL- s’est penchée sur le cas du site « TADATA » permettant aux étudiants et jeunes de 15 à 25 ans de monétiser leurs données personnelles, la CNIL ne s’est pas prononcée sur la conformité de ce site au RGPD, ni sur leur monétisation, laissant la question entière).
Parallèlement, ni le droit de l’Union, ni le droit interne, n’interdit per se, le commerce des données personnelles.
Les règles posées par le RGPD viennent tempérer cette affirmation en posant les conditions de protection et de transmission des données personnelles parmi lesquelles, la nécessité dans certains cas d’un consentement préalable de la personne concernée à tout partage de ses données personnelles (CA Orléans 11 mars 2021 « Parce que toute personne doit pouvoir contrôler l’utilisation qui est faite de ses données personnelles, le responsable du traitement des données doit donc obtenir un consentement spécifique à la vente des données »). Ce tempérament ne vient cependant que permettre d’affiner les conditions de commercialisation des données personnelles et d’en accroitre leur qualité.
Ainsi, dans le marché des données, celui des données personnelles occupe une place prépondérante. Au sein de ce marché des données personnelles, celui des fichiers de données personnelles de clients et prospects tient pour sa part une place aussi essentielle que ce fichier l’est pour tout fonds de commerce. La commission d’Examen des Pratiques Commerciales s’est ainsi prononcée en ce sens en considérant que « La clause selon laquelle, à l’expiration du contrat de concession exclusive, le concédant a le droit de garder les données clients et prospects dans ses bases de données et de les utiliser selon les conditions préalablement acceptées par les clients et prospects est susceptible d’être à l’origine d’un déséquilibre significatif dès lors que cette obligation est dépourvue de justification ou n’est pas assortie d’une contrepartie » (Avis CEPC n° 18-4 du 12 avril 2018).
Par cet Avis, le CEPC a concilié le droit des données personnelles -droit maintenant consacré- avec le droit de la concurrence, suivant en cela les recommandations de l’Autorité de la Concurrence qui s’était associée au Bundeskartellamt pour émettre, le 10 mai 2016, le rapport relatif au « Droit de la concurrence et données »
Constatant l’importance des données et des données personnelles dans l’économie numérique, le Président de l’Autorité de la Concurrence Benoît Coeuré appelle de ses vœux, dans un discours du 2 juin 2022 publié le 8 juin 2022, le renforcement de la coopération des autorités de concurrence et de protection des données pour assurer une réelle articulation cohérente des droits en présence afin de ne pas compromettre les objectifs de l’un en poursuivant ceux de l’autre.
La coopération est absolument nécessaire dans le cadre des plateformes numériques qui permettent une collecte et une exploitation massive de données octroyant à leur propriétaire exploitant un pouvoir de marché dans lequel les données personnelles constituent un paramètre de concurrence essentiel.