Les autorités de concurrence polynésienne et néo-calédonienne
En Polynésie-Française, l’Autorité polynésienne de la concurrence (APC), qui a été créée par la loi du pays n° 2015-2 du 23 février 2015 relative à la concurrence, est compétente pour rendre des avis sur toute question de concurrence, rechercher, constater et sanctionner des pratiques anticoncurrentielles (ententes, abus de position dominante) et contrôler, en amont de leur réalisation, des opérations de concentrations ainsi que la création ou l’extension de surfaces commerciales qui interviennent sur le territoire polynésien, dans les conditions prévues par le code de la concurrence polynésien.
Pour sa part, l’Autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie (ACNC), créée par la loi du pays n° 2014-12 du 24 avril 2014, n’exerce sa compétence que depuis le 2 mars 2018, date de son installation officielle. Son champ matériel est plus large que celui de l’ADLC et de l’APC. En effet, comme l’ADLC et l’APC, elle est compétente pour rendre des avis, sanctionner des pratiques anticoncurrentielles (ententes, abus de position dominante) et contrôler, en amont de leur réalisation, des opérations de concentrations intervenant sur le territoire calédonien. De plus, comme l’APC, elle est chargée de contrôler, en amont, la création ou l’extension de surfaces commerciales en Nouvelle-Calédonie au-delà de certains seuils. Néanmoins, le code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie lui donne également compétence pour sanctionner les pratiques restrictives de concurrence mises en œuvre sur le territoire calédonien (« le petit droit de la concurrence » dont le contrôle relève de l’administration en métropole et en Polynésie-française) et pour rendre des avis obligatoires sur toute demande de barrières quantitatives ou tarifaires à l’importation formulée par un producteur local.
Comme sur le territoire national, l’APC et l’ACNC ne peuvent être saisie de pratiques anticoncurrentielles remontant à plus de cinq ans s’il n’a été fait aucun acte tendant à leur recherche, leur constatation ou leur sanction. S’agissant de la compétence de l’ACNC en matière de pratiques restrictives de concurrence, la prescription est de trois ans.
À noter que le droit de la concurrence européen n’est pas applicable dans les pays et territoires d’outre-mer (PTOM) comme la Polynésie-française et la Nouvelle-Calédonie.
La répartition des compétences entre les autorités de concurrence françaises et le juge administratif pour des pratiques mises en œuvre par des personnes publiques ou privées
Selon la jurisprudence du Tribunal des conflits Aéroports de Paris et Gisserot, lorsque les pratiques ou la décision en cause traduisent l’exercice de prérogatives de puissance publique ou portent sur l’organisation même du service public, le juge administratif est exclusivement compétent pour apprécier la légalité de ces actes unilatéraux au regard du droit de la concurrence qui leur est opposable (ex : refus d’occupation du domaine public délivrés par les collectivités publiques, décision d’attribution de contrats publics). En revanche, lorsque ces pratiques ou décisions unilatérales sont détachables de l’exercice de prérogatives de puissance publique et qu’elles présentent un caractère économique, l’Autorité de la concurrence (ADLC, APC ou ACNC) est seule compétente pour contrôler le respect des règles de la concurrence.
Les juridictions de recours en droit de la concurrence
Qu’il s’agisse des décisions contentieuses de l’ADLC, l’APC ou de l’ACNC relatives à des pratiques anticoncurrentielles, le recours en annulation ou en réformation doit être porté devant la cour d’appel de Paris, qui dispose d’une compétence d’attribution exclusive, et le pourvoi devant la Cour de cassation. Les décisions de concentrations de l’ADLC ne peuvent faire l’objet d’un recours en premier et dernier ressort que devant le Conseil d’État alors que les décisions non contentieuses de l’APC et de l’ACNC sont susceptibles d’appel devant la cour administrative d’appel de Paris et de pourvoi devant le Conseil d’État.
Au niveau européen, les décisions de la Commission sont attaquables devant le Tribunal de l’Union européenne et le pourvoi peut être porté devant la Cour de Justice de l’Union européenne.
La répartition de la compétence territoriale entre l’ADLC et l’APC
Dans sa décision n° 20-D-18 du 18 novembre 2020 relative à des pratiques mises en œuvre sur le territoire de la Polynésie-Française, l’ADLC a décliné sa compétence à connaitre les pratiques mises en œuvre en Polynésie : car (i) elle n’est pas habilitée par le législateur à appliquer le droit de la concurrence Polynésien et (ii) elle n’est pas habilitée à examiner les griefs sous la qualification du droit national et européen de la concurrence, qui ne s’applique pas en Polynésie.
Dans un arrêt du 12 mai 2022, la Cour d’appel a confirmé cette analyse tout en annulant cette décision en ce qu’elle avait clôturé la procédure dont elle avait été saisie, puis, évoquant l’affaire, a renvoyé cette dernière à l’instruction devant l’Autorité polynésienne de la concurrence, autrement composée.
Il en serait de même s’agissant de pratiques mises en œuvre en Nouvelle-Calédonie.