Le décret n° 53-704 du 9 août 1953 relatif au maintien ou au rétablissement de la libre concurrence industrielle et commerciale a inséré dans l’ordonnancement national des dispositions sur les ententes illicites et créé la Commission technique des ententes rattachée au ministre de l’Économie, dotée d’un pouvoir consultatif en matière de pratiques d’ententes illicites. Le décret énonce à cet égard un principe d’interdiction des « actions concertées […] ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet d’entraver […] la concurrence en faisant obstacle à l’abaissement des prix de revient ou de vente, ou en favorisant une hausse artificielle des prix ».
Celle-ci est renommée Commission technique des ententes et des positions dominantes par la loi de finances rectificative n° 63-628 du 2 juillet 1963, et son champ d’action est étendu aux abus de position dominante.
La loi n° 77-806 du 19 juillet 1977 lui substitue la Commission de la concurrence et consacre son double pouvoir consultatif auprès de l’exécutif : conseiller le gouvernement sur toute question intéressant la concurrence, en matière de pratiques d’ententes ou d’abus de position dominante, et, pour la première fois, donner des avis sur les opérations ou projets de concentration.
L’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence met fin à la réglementation des prix en même temps qu’elle établit un organe indépendant de régulation concurrentielle, doté d’un pouvoir de décision : le Conseil de la concurrence. Il peut être saisi directement par les entreprises, engager de son propre chef des poursuites, prononcer des injonctions, infliger des sanctions financières et formuler des recommandations aux pouvoirs publics, y compris sur des projets de textes législatifs ou réglementaires. Signalant l’indépendance de cette institution à l’égard du pouvoir exécutif et le souhait de reconnaître la compétence de l’ordre juridictionnel, le contrôle des décisions du Conseil de la concurrence est confié à la juridiction judiciaire.
Une nouvelle avancée est opérée avec la loi n° 2001-420 sur les nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001, qui marque l’accroissement concomitant des pouvoirs du Conseil de la concurrence, ainsi que de son autonomie budgétaire. Une évolution institutionnelle fondamentale est actée en ce qu’une séparation fonctionnelle est instituée entre services d’instruction, d’une part, et organe de décision (le collège), d’autre part. La composition de l’Autorité de la concurrence et son organisation garantissent ainsi son indépendance et son impartialité. Le collège comprend ainsi dix-sept membres issus de la sphère publique ou de la société civile (actuels ou anciens membres du Conseil d’État, de la Cour de cassation, de la Cour des comptes ou des autres juridictions administratives ou judiciaires, ou choisis en raison de leurs compétences en matière économique).
La grande réforme opérée par la loi n° 2008-776 de modernisation de l’économie du 4 août 2008, complétée ensuite par voie d’ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence, parachève ce mouvement d’unification et d’indépendance de la régulation concurrentielle. Elle crée l’Autorité de la concurrence, autorité administrative indépendante, et procède à un renforcement de ses pouvoirs ; transférant le pouvoir de contrôle des concentrations des services du ministre de l’Économie au régulateur indépendant ; conférant des pouvoirs d’enquête autonomes ; et, enfin, permettant à l’Autorité de s’autosaisir en matière consultative.
La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 a confié à l’Autorité de nouvelles fonctions consultatives en lien avec le contrôle des tarifs et de l’installation de certaines professions juridiques réglementées et a introduit un certain nombre d’adaptations d’ordre procédural, facteurs de plus grande efficacité et de souplesse pour l’Autorité dans la mise en œuvre du noyau dur de ses missions, la répression des pratiques anticoncurrentielles et le contrôle des concentrations (introduction de la procédure de transaction et de mesures ciblées pour garantir une application plus fluide et efficace des règles en matière de contrôle des concentrations). Elle met en outre en place un dispositif de surveillance des rapprochements à l’achat dans le secteur de la grande distribution qui sera renforcé par la loi no 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
La loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière et l’ordonnance no 2021-649 du 26 mai 2021 relative à la transposition de la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur comportent des mesures de renforcement et de modernisation du droit de la concurrence et des outils dont dispose l’Autorité de la concurrence. Outre les mesures de rationalisation des procédures d’instruction de l’Autorité (présence d’un seul officier de police judiciaire par site lors d’une opération de visite et saisie, possibilité pour un juge des libertés et de la détention unique de l’autoriser en plusieurs lieux du territoire et de contrôler son déroulement, élargissement du champ d’application de la procédure contentieuse simplifiée) résultant directement de la loi, la transposition de la directive ECN + parachève la modernisation des outils de l’Autorité (notamment la faculté de fixer ses propres priorités et de rejeter les plaintes qui n’y correspondent pas, le pouvoir de saisine d’office pour imposer des mesures conservatoires ou encore le pouvoir de prononcer des injonctions structurelles).