Autorité de la concurrence

 

Définition auteur

 

Premier aperçu

Autorité administrative indépendante chargée de garantir le bon fonctionnement de la concurrence sur le marché en vue de l’établissement et de la préservation d’un terrain de jeu concurrentiel ouvert et équitable, l’Autorité de la concurrence a été créée à la faveur de la loi de modernisation de l’économie du 4 août 2008, complétée par l’ordonnance de modernisation de la régulation de la concurrence du 13 novembre 2008 et quinze décrets d’application. Elle a officiellement succédé au Conseil de la concurrence le 2 mars 2009, date de la première réunion de son collège.

L’Autorité remplit trois missions complémentaires. Elle est tout d’abord investie d’une mission d’arbitre et de gendarme de la concurrence. Elle veille à cet égard au respect du droit de la concurrence en intervenant ex post, c’est-à-dire postérieurement à la réalisation de la pratique anticoncurrentielle en cause, pour remédier aux comportements illicites des entreprises qui chercheraient à s’abstraire d’une concurrence par les mérites et, le cas échéant, les sanctionner. Elle est chargée à ce titre de la détection et de la répression des pratiques anticoncurrentielles, ententes et abus de position dominante, au titre tant du droit national (titre II du livre IV du code de commerce et en particulier art. L. 420-1 et L. 420-2) que du droit européen (art. 101 et 102 TFUE). Elle dispose à cette fin d’une boîte à outils complète qui lui permet d’envisager des solutions négociées (par exemple dans le cadre d’une procédure d’engagements ou de transaction), d’intervenir d’urgence (via le prononcé de mesures conservatoires) ou encore d’adopter des injonctions comportementales ou structurelles en complément des sanctions pécuniaires qu’elle peut être amenée à prononcer.

L’Autorité veille également à ce que les opérations de croissance externe des entreprises ne brident ni n’entravent la concurrence. C’est le contrôle des concentrations (titre III du livre IV du code de commerce) qui intervient en amont de la réalisation des opérations de concentration qui dépassent certains seuils exprimés en chiffre d’affaires, dans le cadre d’une procédure non contentieuse. L’Autorité s’assure, par un examen simple ou, lorsque cela est nécessaire, un examen approfondi, que l’opération de concentration envisagée ne porte pas atteinte aux équilibres concurrentiels sur le marché. Afin de remédier aux préoccupations de concurrence identifiées, elle peut accepter les engagements comportementaux ou structurels proposés par les entreprises.

L’Autorité est également chargée d’une mission consultative qui lui permet d’éclairer les acteurs économiques, qu’ils soient publics ou privés, sur les risques concurrentiels (art. L. 462-1 à L. 462-4 C. com.). À ce titre, elle rend des avis aux pouvoirs publics, aux organisations professionnelles ou aux associations de consommateurs sur toute question de concurrence. Elle peut également s’autosaisir pour avis dans le cadre d’enquêtes sectorielles.

Par ailleurs, l’Autorité est dotée depuis la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 de fonctions consultatives en lien avec le contrôle des tarifs et de l’installation de certaines professions juridiques réglementées. Elle est chargée de donner un avis sur les prix et tarifs réglementés applicables aux commissaires-priseurs judiciaires, aux greffiers de tribunal de commerce, aux huissiers de justice, aux administrateurs judiciaires, aux mandataires judiciaires et aux notaires, ainsi que sur les droits et émoluments de l’avocat en matière de saisie immobilière, de partage, de licitation et de sûretés judiciaires (art. L. 462-2-1 C. com.). Elle rend en outre au ministre de la Justice des avis sur la liberté d’installation des notaires, des huissiers de justice, des commissaires-priseurs judiciaires et des avocats au Conseil d’État et à la Cour de cassation. Elle fait dans ce cadre toutes recommandations en vue d’améliorer l’accès aux offices publics ou ministériels dans la perspective de renforcer la cohésion territoriale des prestations et d’augmenter de façon progressive le nombre d’offices sur le territoire (art. L. 462-4-1 et L. 462-4-2 C. com.).

 

Pour aller plus loin

Le décret n° 53-704 du 9 août 1953 relatif au maintien ou au rétablissement de la libre concurrence industrielle et commerciale a inséré dans l’ordonnancement national des dispositions sur les ententes illicites et créé la Commission technique des ententes rattachée au ministre de l’Économie, dotée d’un pouvoir consultatif en matière de pratiques d’ententes illicites. Le décret énonce à cet égard un principe d’interdiction des « actions concertées […] ayant pour objet ou pouvant avoir pour effet d’entraver […] la concurrence en faisant obstacle à l’abaissement des prix de revient ou de vente, ou en favorisant une hausse artificielle des prix ».

Celle-ci est renommée Commission technique des ententes et des positions dominantes par la loi de finances rectificative n° 63-628 du 2 juillet 1963, et son champ d’action est étendu aux abus de position dominante.

La loi n° 77-806 du 19 juillet 1977 lui substitue la Commission de la concurrence et consacre son double pouvoir consultatif auprès de l’exécutif : conseiller le gouvernement sur toute question intéressant la concurrence, en matière de pratiques d’ententes ou d’abus de position dominante, et, pour la première fois, donner des avis sur les opérations ou projets de concentration.

L’ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence met fin à la réglementation des prix en même temps qu’elle établit un organe indépendant de régulation concurrentielle, doté d’un pouvoir de décision : le Conseil de la concurrence. Il peut être saisi directement par les entreprises, engager de son propre chef des poursuites, prononcer des injonctions, infliger des sanctions financières et formuler des recommandations aux pouvoirs publics, y compris sur des projets de textes législatifs ou réglementaires. Signalant l’indépendance de cette institution à l’égard du pouvoir exécutif et le souhait de reconnaître la compétence de l’ordre juridictionnel, le contrôle des décisions du Conseil de la concurrence est confié à la juridiction judiciaire.

Une nouvelle avancée est opérée avec la loi n° 2001-420 sur les nouvelles régulations économiques du 15 mai 2001, qui marque l’accroissement concomitant des pouvoirs du Conseil de la concurrence, ainsi que de son autonomie budgétaire. Une évolution institutionnelle fondamentale est actée en ce qu’une séparation fonctionnelle est instituée entre services d’instruction, d’une part, et organe de décision (le collège), d’autre part. La composition de l’Autorité de la concurrence et son organisation garantissent ainsi son indépendance et son impartialité. Le collège comprend ainsi dix-sept membres issus de la sphère publique ou de la société civile (actuels ou anciens membres du Conseil d’État, de la Cour de cassation, de la Cour des comptes ou des autres juridictions administratives ou judiciaires, ou choisis en raison de leurs compétences en matière économique).

La grande réforme opérée par la loi n° 2008-776 de modernisation de l’économie du 4 août 2008, complétée ensuite par voie d’ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence, parachève ce mouvement d’unification et d’indépendance de la régulation concurrentielle. Elle crée l’Autorité de la concurrence, autorité administrative indépendante, et procède à un renforcement de ses pouvoirs ; transférant le pouvoir de contrôle des concentrations des services du ministre de l’Économie au régulateur indépendant ; conférant des pouvoirs d’enquête autonomes ; et, enfin, permettant à l’Autorité de s’autosaisir en matière consultative.

La loi n° 2015-990 du 6 août 2015 a confié à l’Autorité de nouvelles fonctions consultatives en lien avec le contrôle des tarifs et de l’installation de certaines professions juridiques réglementées et a introduit un certain nombre d’adaptations d’ordre procédural, facteurs de plus grande efficacité et de souplesse pour l’Autorité dans la mise en œuvre du noyau dur de ses missions, la répression des pratiques anticoncurrentielles et le contrôle des concentrations (introduction de la procédure de transaction et de mesures ciblées pour garantir une application plus fluide et efficace des règles en matière de contrôle des concentrations). Elle met en outre en place un dispositif de surveillance des rapprochements à l’achat dans le secteur de la grande distribution qui sera renforcé par la loi no 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.

La loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière et l’ordonnance no 2021-649 du 26 mai 2021 relative à la transposition de la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur comportent des mesures de renforcement et de modernisation du droit de la concurrence et des outils dont dispose l’Autorité de la concurrence. Outre les mesures de rationalisation des procédures d’instruction de l’Autorité (présence d’un seul officier de police judiciaire par site lors d’une opération de visite et saisie, possibilité pour un juge des libertés et de la détention unique de l’autoriser en plusieurs lieux du territoire et de contrôler son déroulement, élargissement du champ d’application de la procédure contentieuse simplifiée) résultant directement de la loi, la transposition de la directive ECN + parachève la modernisation des outils de l’Autorité (notamment la faculté de fixer ses propres priorités et de rejeter les plaintes qui n’y correspondent pas, le pouvoir de saisine d’office pour imposer des mesures conservatoires ou encore le pouvoir de prononcer des injonctions structurelles).

 

Bibliographie

Ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021 relative à la transposition de la directive (UE) 2019/1 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence et à garantir le bon fonctionnement du marché intérieur, JORF n° 0121 du 27 mai 2021

Loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, JORF n° 0293 du 4 décembre 2020

Loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, JORF n° 0253 du 1 novembre 2018

Loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, JORF n° 0181 du 7 août 2015

Ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008 portant modernisation de la régulation de la concurrence, JORF n° 0265 du 14 novembre 2008

Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, JORF n° 0181 du 5 août 2008

Loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques, JORF n° 113 du 16 mai 2001

Ordonnance n° 86-1243 du 1 décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, JORF du 9 décembre 1986

Loi n° 77-806 du 19 juillet 1977 relative au contrôle de la concentration économique et à la répression des ententes illicites et des abus de position dominante, JORF du 20 juillet 1977

Loi n° 63-628 du 2 juillet 1963 de finances rectificative pour 1963, JORF du 3 juillet 1963

Décret n° 53-704 du 9 août 1953 dit décret anti-trust réglementant les ententes professionnelles et rétablissant la libre concurrence, JORF du 10 août 1953

IDOT (L.), DAIEFF (G.), DE SILVA (I.), ARCELIN (L.), BOUDOU (M.), FOURGOUX (J.-L.), UTZSCHNEIDER (Y.), CLAMENS (A.) et LEMAIRE (Ch.), « La loi DDADUE : Simple adaptation ou réforme du droit français de la concurrence ? », Concurrences no 1-2021, art. no 98839, p. 22

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OCDE, « Table ronde sur l’évolution institutionnelle des autorités de concurrence – Contribution de l’Autorité française de la concurrence », DAF/COMP/WD(2014)104, 25 février 2015

Site de l’Autorité de la concurrence

Auteur

  • Autorité de la concurrence (Paris)

Citation

Mathias Pigeat, Autorité de la concurrence, Dictionnaire de droit de la concurrence, Concurrences, Art. N° 106810

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Éditeur Concurrences

Date 1er février 2023

Nombre de pages 842

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