Pour pouvoir qualifier une entente, la preuve de l’existence d’un accord de volontés entre deux ou plusieurs entreprises doit être apportée.
C’est la raison pour laquelle ne relèvent pas des articles 101 du traité et L. 420-1 du code de commerce les contrats d’agence dans lesquels l’agent ne supporte aucun risque financier ou commercial important en rapport avec les contrats qu’il conclut ou négocie au nom du commettant. En effet, l’agent n’agit alors plus en tant qu’opérateur économique indépendant, de sorte que le contrat d’agence ne constitue pas un accord entre des entreprises différentes.
De manière plus générale, la pratique décisionnelle des autorités de concurrence et la jurisprudence de leurs cours de contrôle a permis de préciser les conditions de preuve d’un accord de volontés dans une relation verticale. Les principes ressortant de la jurisprudence sont, notamment, rappelés dans les lignes directrices de la Commission européenne sur les restrictions verticales du 10 mai 2022 (paragraphes 53 à 55) ainsi que dans les décisions de l’Autorité de la concurrence n° 21-D-20 du 22 juillet 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des lunettes et montures de lunettes (paragraphes 566 à 578) et n° 21-D-26 du 8 novembre 2021relative à des pratiques mises en œuvre au sein du réseau de distribution des produits de marque Mobotix (paragraphes 141 à 152).
Il en résulte en substance que :
– pour démontrer un accord au sens de l’article 101 du traité ou de l’article L. 420-1 du code de
commerce, il suffit que les parties aient exprimé leur intention commune de se comporter
d’une manière particulière sur le marché (arrêt de la CJCE du 15 juillet 1970, ACF
Chemiefarma / Commission, aff. C-41/69, point 112), indépendamment de la forme de cette
expression (arrêt de la CJUE du 14 janvier 2021, Kilpailu-ja kuluttajavirasto, aff. C-450/19,
point 21) ;
– doivent être établis « l’invitation d’une partie à l’accord à mettre en œuvre une pratique
illicite et l’acquiescement de l’autre à cette invitation » (arrêt de la Cour d’appel de Paris du
28 janvier 2009, Epsé Joué Club, page 9) ;
– la preuve de l’accord peut être établie par tout moyen, la Cour d’appel de Paris ayant à cet
égard précisé « qu’elle peut être constituée par des preuves directes (tel qu’un écrit) ou
indirectes (tel qu’un comportement) et qu’en présence de preuves documentaires ou
contractuelles, il n’est pas besoin de recourir, au surplus, à l’étude de preuve de nature
comportementale » (arrêt de la Cour d’appel de Paris du 6 octobre 2022, Apple, paragraphe
167) et que « rien ne s’oppose à ce que la démonstration de l’existence d’une telle pratique
résulte de la combinaison de différents éléments de preuve, directs et indirects, notamment en
présence de pratiques sophistiquées reposant sur des mécanismes qui, pris isolément,
pourraient revêtir l’apparence de la légalité, pour autant qu’ils constituent, ensemble, un
faisceau d’indices graves, précis et concordants » (ibid., paragraphe 456) ;
– plus précisément, « si le mode de preuve le plus généralement utilisé du concours de volontés
en matière d’entente verticale sur les prix s’articule autour de la réunion de trois indices,
qualifiée de « faisceau à trois branches » (diffusion de prix, mise en oeuvre d’une police des
prix et application significative des prix diffusés), la preuve de ce concours de volontés peut
également résulter d’autres indices, documentaires ou comportementaux, permettant
d’établir, d’une part, l’invitation du fabricant, et d’autre part, l’acquiescement des
distributeurs à la pratique litigieuse » (idem).