Depuis la fin de la notification préalable et obligatoire des accords de coopération à la Commission européenne, cette dernière a publié des lignes directrices proposant une grille d’analyse qui permet aux entreprises d’autoévaluer la compatibilité de l’accord horizontal envisagé avec l’article 101 TFUE. Elles présentent une méthode pour appliquer les règles du droit de la concurrence de l’Union qui éclaire également l’application des différents droits nationaux de la concurrence en Europe.
Dans ce cadre, il appartient aux entreprises de déterminer si l’accord de coopération envisagé est restrictif de concurrence et, dans l’affirmative, d’évaluer si les effets bénéfiques de l’accord sur la concurrence l’emportent sur les effets restrictifs afin que l’accord de coopération puisse bénéficier d’une exemption au titre de l’article 101, paragraphe 3, TFUE (ou L. 420-4 C. com.).
Dans un premier temps, les entreprises, parties à l’accord de coopération, doivent évaluer les effets nocifs de leur coopération sur le marché en tenant compte de la nature et du contenu de l’accord, d’une part, et de leur pouvoir de marché, d’autre part. Afin de déterminer leur pouvoir de marché, elles doivent définir le marché de produit et le marché géographique concerné par l’accord de coopération et établir leur part de marché cumulée sur ce marché. Plus cette part de marché cumulée sera faible et moins l’accord de coopération sera susceptible de produire des effets restrictifs de concurrence. Les lignes directrices précisent qu’« il n’est pas possible de définir un seuil de part de marché général à partir duquel on pourrait présumer l’existence d’un pouvoir de marché suffisant pour causer des effets restrictifs sur la concurrence » (lignes directrices n°2011/C 11/01, pt 44). Partant, ce seuil peut varier de 15% à 25% selon le type d’accord, conformément à ceux analysés dans les lignes directrices.
Toutefois, en dehors des accords examinés dans lesdites lignes directrices, dans sa Communication de minimis, la Commission estime que les accords de coopération sont peu susceptibles de restreindre sensiblement le jeu de la concurrence lorsque les parties à l’accord ont des parts de marché cumulées ne dépassant pas 10% en cas d’accords conclus entre concurrents et 15% pour les accords conclus entre non concurrents.
Dans un second temps, les entreprises doivent évaluer si les effets négatifs induits par l’accord de coopération sur le marché peuvent être contrebalancés par des effets favorables à la concurrence. Pour ce faire, elles doivent déterminer si les conditions cumulatives suivantes sont réunies pour bénéficier de l’exemption :
– l’accord entraîne des gains d’efficacité en contribuant à améliorer la production ou la
distribution du produit, ou à promouvoir le progrès technique ou économique ;
– l’accord est indispensable pour atteindre ses objectifs et vérifier qu’il n’existe pas d’autres
alternatives moins restrictives de concurrence que la conclusion de l’accord de coopération
envisagé ;
– les gains d’efficacité engendré par l’accord de coopération sont répercutés de manière
suffisante sur les consommateurs ;
– l’accord ne tend pas à éliminer la concurrence sur le marché.
Cette grille d’analyse est applicable à tous les accords de coopération horizontale, et particulièrement à ceux analysés dans les lignes directrices de la Commission.
Toutefois, pour certains types d’accords, il convient également de se référer aux différents règlements d’exemption par catégorie adoptés par la Commission qui déterminent les conditions dans lesquelles ces accords sont présumés compatibles avec le droit de la concurrence et, partant, bénéficient d’une exemption. Ces règlements d’exemption portent sur les accords de recherche et de développement (règl. (UE) n° 1217/2010), les accords de spécialisation (applicable aux accords de production - règl. (UE) n° 1218/2010) et les accords de transfert de technologie (règl. (UE) n° 316/2014).
Dans certains cas, comme pour les accords de coopération portant sur l’achat groupé de produits, l’analyse de la compatibilité avec le droit de la concurrence doit également se faire au regard des règles applicables aux accords verticaux (règl. (UE) n° 2022/720 et lignes directrices sur les restrictions verticales), dans la mesure où ils sont susceptibles d’affecter tant le marché amont que le marché aval de l’objet de la coopération. Cette analyse suit la même logique que pour les accords horizontaux dans le sens où les entreprises doivent déterminer si l’accord comporte des restrictions verticales et, dans l’affirmative, si elles peuvent bénéficier d’une exemption.
Les lignes directrices ne s’appliquent pas aux accords conclus dans certains secteurs dont l’application des règles de concurrence est régie par des règlements spécifiques : le secteur des produits agricoles (règl. (CE) n° 1184/2006) et celui des transports (règl. (CE) n°169/2009).