Une entreprise en position dominante détenant l’accès à une installation essentielle sans l’utilisation de laquelle les concurrents se trouvent dans l’impossibilité d’exercer leur activité, doit accorder l’accès à son installation dans des conditions équitables, raisonnables et non discriminatoires. En effet, elle ne peut imposer des conditions discriminatoires à I‘avantage de ses propres activités.
Il est de principe qu’une entreprise, dominante ou non devrait être en droit de choisir ses partenaires commerciaux et de disposer librement de ses biens.
L’obligation de donner accès à une installation essentielle constitue donc une atteinte à la liberté de commerce et aux droits de propriété intellectuelle de l’entreprise qui la détient.
Pour cette raison, la théorie des facilités essentielles a largement été débattue en doctrine, notamment lorsque la facilité en cause est protégée par un droit de propriété intellectuelle, puisque les autorités de concurrence doivent arbitrer entre les bénéfices escomptés suite à l’octroi d’une licence, les innovations possibles par la divulgation d’informations, tout en prenant en compte l’impact de l’octroi d’une telle licence sur l’innovation.
Par ailleurs, l’accès est uniquement prononcé lorsque le titulaire a bénéficié du temps nécessaire pour rentabiliser son investissement. Dans le cas contraire, un « monopole temporaire » est accordé au titulaire de la facilité en cause.
Ainsi, une restriction à la liberté de commerce sera nécessaire et justifiée à des fins de garantie de la concurrence sur le marché, toutes les fois où les conditions suivantes seront réunies :
– L’entreprise est en situation de position dominante
– L’accès à l’infrastructure est indispensable pour exercer une activité concurrente sur un marché amont, aval ou complémentaire de celui sur lequel le détenteur de l’infrastructure détient une position dominante
– Il n’existe aucun substitut réel ou potentiel à l’infrastructure qui ne peut être reproduite dans des conditions économiques raisonnables par les concurrents de l’entreprise qui la détient
– L’accès à cette infrastructure est refusé ou autorisé dans des conditions défavorables
La condition d’application fondamentale de la théorie des facilités essentielles consiste donc à reconnaître un refus d’accès opposé à un opérateur économique par le titulaire de la facilité essentielle.
Pour être « essentielle », l’accès à l’installation doit être strictement nécessaire à l’exercice de l’activité des concurrents potentiels du propriétaire de la facilité en cause, de sorte qu’il ne doit exister aucune alternative. La facilité en cause doit donc être indispensable et non substituable.
Toutefois, le refus d’accès à l’installation essentielle est justifié lorsque (i) le caractère indispensable de la facilité n’est pas déterminé ou (ii) lorsque le propriétaire se trouve dans l’impossibilité d’accorder l’accès à la facilité en cause.
A ce jour, la théorie des facilités essentielles trouve principalement à s’appliquer dans les décisions d’engagements adoptées par la Commission européenne en vertu de l’article 9 du règlement n°1/2003 qui lui permet de rendre les engagements proposés par les entreprises obligatoires.
Très fréquemment, les entreprises détentrices d’infrastructures essentielles choisissent de concéder un accès à leurs concurrents.
De nombreuses décisions ont été adoptées dans le secteur de l’énergie et des nouvelles technologies. La voie de cette procédure « négociée » est souvent privilégiée lorsqu’apparaît un problème d’interopérabilité.