Le pouvoir d’achat est difficilement appréhendé par le droit de la concurrence. La part de marché est en effet l’élément le plus simple et le plus accessible pour déterminer le pouvoir d’achat d’une entreprise. Or, les acheteurs ne contrôlent généralement qu’une part relativement faible d’un marché de produit déterminé en aval et ne peuvent donc être efficacement régulés par les autorités de concurrence. L’analyse des effets de la concentration des acheteurs sur les marchés amont de l’approvisionnement trouve aussi des limites car la concentration à l’achat implique souvent des conséquences bénéfiques pour le consommateur, alors que d’autres effets négatifs à long terme (la raréfaction de la diversité des produits dans les linéaires par exemple) sont difficiles à appréhender.
Afin d’évaluer du pouvoir d’achat sur le marché amont, la Commission, lors de l’examen d’opérations (Par ex : Carrefour/Promodes en 2000) a créé le concept de « taux de menace » et à demander aux fournisseurs d’indiquer à partir de quel pourcentage de leur chiffre d’affaires ils considéraient que la perte d’un client représenterait une menace pour l’existence même de leur entreprise. Le seuil de 22% a donc émergé de cette pratique européenne et demeure le seul indicateur objectif et simple d’utilisation pour mesurer le pouvoir d’achat.
Conscient que les outils classiques (contrôle des concentrations, droit des pratiques anticoncurrentielles et même droit des pratiques restrictives avec un bilan très contrasté de l’application l’article L442-6 du Code de commerce sur les pratiques des grandes enseignes) étaient insuffisants pour réguler les abus de puissance d’achat observés sur le marché de la distribution de détail, notamment alimentaire, le législateur français a inséré au terme de la Loi Macron, complété par la loi EGalim l’article L. 462-10 au Code de commerce, en vertu duquel « doit être communiqué à l’Autorité de la concurrence, à titre d’information, au moins quatre mois avant sa mise en œuvre, tout accord entre des entreprises ou des groupes de personnes physiques ou morales exploitant, directement ou indirectement, un ou plusieurs magasins de commerce de détail de produits de grande consommation, ou intervenant dans le secteur de la distribution comme centrale de référencement ou d’achat d’entreprises de commerce de détail, visant à négocier de manière groupée l’achat ou le référencement de produits ou la vente de services aux fournisseurs ».
Aux termes de l’article L. 462-10, III, l’Autorité de la concurrence dispose de larges pouvoirs (mesures conservatoires, injonctions) afin de faire modifier les accords si elle devait constater une atteinte grave à la concurrence.