Entreprise publique

 

Définition auteur

 

Premier aperçu

La notion d’entreprise publique renvoie à plusieurs approches de l’intervention de l’Etat dans l’économie, comme le secteur public, les participations de l’Etat, l’économie mixte locale ou encore les services publics et elle est appréhendée notamment par les droits de l’Union européenne, constitutionnel et administratif. Ces remarques montrent la difficulté qui existe à proposer une définition unique de l’entreprise publique. Le droit interne aborde parfois la notion sans se focaliser précisément sur cette dernière (v. par ex. ordonnance n° 2014-948, 20 août 2014, relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, JORF n°0194 du 23 août 2014, art. 22) ou par un biais énumératif (V. par ex. décret n°84-966, 22 oct. 1984, instituant le répertoire des entreprises contrôlées majoritairement par l’Etat). Il révèle que c’est avant tout la détention majoritaire du capital qui permet d’identifier une entreprise publique (CE, avis, Sect. des finances, 17 sept. 1998, entreprise du secteur public, n° 362610) et plus généralement l’exercice direct ou indirect, d’un « pouvoir prépondérant de décision ou de gestion » (Code des juridictions financières, art. L133-1). C’est aussi par les mesures de transposition (Ordonnance n° 2004- 503, 7 juin 2004, portant transposition de la directive n°80/723/ CEE relative à la transparence des relations financières entre les Etats membres et les entreprises publiques, art. 1, II) du droit de l’Union européenne qu’une définition a pu émerger dans le droit national.

Selon l’article 2 de la directive n°2006/111 (16 nov. 2006, relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques ainsi qu’à la transparence financière dans certaines entreprises), une entreprise publique est « toute entreprise sur laquelle les pouvoirs publics peuvent exercer directement ou indirectement une influence dominante du fait de la propriété, de la participation financière ou des règles qui la régissent ». L’influence dominante est présumée lorsque, directement ou indirectement, les pouvoirs publics « détiennent la majorité du capital souscrit de l’entreprise », « disposent de la majorité des voix attachées aux parts émises par l’entreprise » ou « peuvent désigner plus de la moitié des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance de l’entreprise ».

On retiendra surtout que le droit de l’Union européenne envisage spécialement l’entreprise publique par le prisme concurrentiel de l’article 106 § 1 qui prévoit que les « États membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n’édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux règles des traités » et son paragraphe 2 relatif aux entreprises chargées d’un service d’intérêt économique général.

 

Pour aller plus loin

Pour qu’une entreprise publique se voit appliquer le droit de la concurrence, il faut avant tout qu’elle soit qualifiable d’entreprise au sens de la jurisprudence européenne (CJCE, 23 avril 1991, Höfner, aff. C-41/90) qui est insensible à la nature de l’entité ou à son mode de financement. Une fois dépassée la question de leur identification, les entreprises publiques sont soumises, dans une certaine mesure, au droit de la concurrence et au droit de la mise en concurrence.

D’une part, les Etats ne peuvent par exemple pas adopter des mesures en direction des entreprises publiques qui contreviennent à l’article 106§1 TFUE en liaison avec l’article 102, sauf à bénéficier d’une dérogation au titre de l’article 106§2 (V. par ex. CJCE, 29 mars 2001, Portugal c/ Commission, aff. C-163/99). Par ailleurs, si les « traités ne préjugent en rien le régime de la propriété dans les États membres » (article 345 TFUE), on observe que l’application du droit de la concurrence n’est pas sans influence sur l’évolution de certaines entreprises publiques françaises qui étaient organisées sous la forme d’un établissement public industriel et commercial (EPIC), comme EDF. EDF était un EPIC mais la position de la Commission à l’encontre de la garantie illimitée de l’État en sa faveur (V. not. décision, 16 déc. 2003, relative aux aides d’État accordées par la France à EDF et au secteur des industries électriques et gazières, 2005/145/CE, JOUE L 49, 22. fév. 2005, p. 9) a provoqué sa transformation en une société anonyme dont l’État doit détenir plus de 70 % du capital (Loi n° 2004-803, 9 août 2004, relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, JORF n°185, 11 août 2004, p. 14256, art. 24 et code de l’énergie, art. L111-67). Le même mouvement a été aussi observé concernant La Poste (Loi n° 2010-123, 9 fév. 2010, relative à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales, JORF n°0034, 10 fév. 2010 p. 2321 ; CJUE, 3 avril 2014, France c/ Commission, aff. C- 559/12).

D’autre part, le droit de la mise en concurrence de l’Union européenne s’applique clairement aux entreprises publiques, telles que définies dans la directive n°2006/111. En effet, les textes européens relatifs à l’attribution de contrats de concession et à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux (Directives n°2014/23 et n°2014/25, 26 févr. 2014 ; art. 7, 1., b) et art. 4, 2) reprennent la définition des entreprises publiques de l’Union européenne. Ainsi, ces textes s’appliquent aux contrats passés par les entités adjudicatrices qui peuvent être des entreprises publiques (v. également, code de la commande publique, art. L1212-1 et L1212-2).

 

Jurisprudences pertinentes

Union européenne

CJUE, 3 avril 2014, France c/ Commission, aff. C-559/12 P, EU:C:2014:217

CJCE, 17 mai 2001, TNT Traco SpA, aff. C-340/99, EU:C:2001:281

CJCE, 29 mars 2001, Portugal c/ Commission, aff. C-163/99, EU:C:2001:189

CJCE, 23 avril 1991, Höfner, aff. C-41/90, EU:C:1991:161

Trib. UE, 5 octobre 2020, France et IFP Énergies nouvelles c/ Commission, aff. jtes. T-479/11 RENV et T-157/12 RENV, EU:T:2020:461

Comm. CE, déc. 2005/145/CE du 16 décembre 2003 relative aux aides d’État accordées par la France à EDF et au secteur des industries électriques et gazières, JOUE no L 49 du 22 février 2005, p. 9

France

CE, avis, Sect. des finances, 17 septembre 1998, Entreprise du secteur public, no 362610

 

Bibliographie

Décret no 84-966 du 22 octobre 1984 instituant le répertoire des entreprises contrôlées majoritairement par l’État, JORF du 28 octobre 1984

Directive 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 relative à la passation de marchés par des entités opérant dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux et abrogeant la directive 2004/17/CE, JOUE no L 94 du 28 mars 2014, p. 243

Directive 2014/23/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014 sur l’attribution de contrats de concession Texte présentant de l’intérêt pour l’EEE, JOUE no L 94 du 28 mars 2014, p. 1

Directive 2006/111/CE de la Commission du 16 novembre 2006 relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques ainsi qu’à la transparence financière dans certaines entreprises, JOUE no L 318 du 17 novembre 2006, p. 17

Loi no 2010-123 du 9 février 2010 relative à l’entreprise publique La Poste et aux activités postales, JORF no 0034 du 10 février 2010

Loi no 2004-803 du 9 août 2004 relative au service public de l’électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, JORF no 185 du 11 août 2004

Ordonnance no 2014-948, 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, JORF no 0194 du 23 août 2014

Ordonnance no 2004-503 du 7 juin 2004 portant transposition de la directive 80/723/CEE relative à la transparence des relations financières entre les États membres et les entreprises publiques, JORF no 0133 du 10 juin 2004

Auteur

  • University of Angers

Citation

Fabien Tesson, Entreprise publique, Dictionnaire de droit de la concurrence, Concurrences, Art. N° 12243

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Éditeur Concurrences

Date 1er février 2023

Nombre de pages 842

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Définition institution

Entreprise sur laquelle les pouvoirs publics exercent directement ou indirectement une influence dominante du fait de la propriété, de la participation financière ou des règles qui la régissent. L’influence dominante des pouvoirs publics est en particulier supposée lorsqu’elles a) détiennent la majorité du capital souscrit de l’entreprise, b) disposent de la majorité des voix attachées aux parts émises par l’entreprise ou c) peuvent désigner plus de la moitié des membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance de l’entreprise. Commission européenne

 
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